Comment les imprimantes SLA et SLS de Formlabs ont aidé à développer le nouveau Ford Explorer ?

L’industrie automobile est en pleine transformation, car la demande des consommateurs et les exigences réglementaires la poussent à se départir des combustibles fossiles et à passer aux véhicules électriques. Ford est à l’avant-garde de ce mouvement, comme c’était le cas lorsqu’elle a produit le modèle T et introduit la chaîne de montage il y a plus de 100 ans.

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Ford Motor Company figure parmi les plus grands constructeurs automobiles mondiaux, avec plus de 4 millions de véhicules produits chaque année et un effectif dépassant les 175 000 collaborateurs à l’échelle internationale. En Europe, l’un des piliers de l’entreprise est situé à Cologne, un site historique fondé en 1930, principalement connu pour l’assemblage de la célèbre Ford Fiesta.

À proximité directe de cette usine se trouve le centre de développement de Cologne-Merkenich. Ce site stratégique est en charge de la conception complète des véhicules particuliers destinés au marché européen. Parmi les modèles développés figurent des best-sellers comme la Fiesta, la Focus, la Kuga, ainsi que l’Explorer, premier véhicule 100 % électrique de Ford conçu spécifiquement pour l’Europe et désormais assemblé en série à Cologne.

Ce centre de développement joue également un rôle dans la mise au point des véhicules utilitaires, en étroite collaboration avec le centre technique de Dunton, situé au Royaume-Uni.

Dans un secteur aussi compétitif, où les cycles de développement s’accélèrent sans cesse, comment Ford reste-t-elle à la pointe ? Le site de Cologne-Merkenich détient une partie de la réponse, notamment grâce à ses capacités de prototypage rapide qui renforcent l’agilité du développement produit.

Des outils de pointe pour la production de prototypes automobiles à grande échelle

« Le prototypage joue un rôle essentiel dans le développement d’un véhicule », explique Sandro Piroddi, responsable du Rapid Technology Center chez Ford. « Il permet aux ingénieurs de valider leurs choix de conception en amont. Modifier un moule d’injection ou un outil de production une fois lancé peut engendrer des coûts élevés, des délais importants et, parfois, l’arrêt temporaire de la chaîne de production. Le recours au prototypage, associé à l’utilisation des technologies les plus avancées, permet de contourner ces obstacles. »

La création de prototypes grandeur nature exige une grande diversité d’outils industriels. Le Rapid Technology Center, centre dédié de Ford, dispose d’un large éventail de solutions de fabrication de dernière génération. On y trouve des presses à injection, des dispositifs de formage, ainsi que de nombreux équipements de fabrication soustractive, notamment des fraiseuses capables de produire des pièces de châssis de très grande taille.

Il va sans dire que la fabrication additive occupe une place de choix dans le processus de prototypage. Le centre de Cologne-Merkenich fait figure de pionnier en la matière : dès 1994, il a été le premier site en Europe à intégrer une imprimante 3D stéréolithographique (SLA) dans ses ateliers. Depuis, ses capacités se sont considérablement étendues avec l’ajout de technologies FDM (dépôt de filament fondu), SLA, SLS (frittage sélectif par laser), ainsi que des solutions d’impression 3D métal.

Si les premières ébauches sont encore modelées en argile, l’usage de technologies de plus en plus proches de la production devient essentiel à mesure que le design se précise. Pouvoir tester des pièces aux formes fidèles et aux fonctionnalités représentatives, dans des matériaux similaires à ceux utilisés en série, est devenu un levier stratégique pour optimiser le développement produit.

« La fabrication additive est très importante dans le processus de développement. Elle vous permet de produire des pièces très rapidement, de manière très efficace, et de réduire les coûts. Vous avez également la possibilité de réagir à court terme. Vu l'évolution vers l'électrification, les délais de développement sont de plus en plus courts, ce qui signifie que le temps dont vous disposez pour développer des composants et vérifier des pièces de véhicules est de plus en plus réduit. Il est donc très important de disposer de cette technologie dans le processus de développement. Cela vous rend beaucoup plus compétitif par rapport à vos concurrents. »

Face à des délais de développement toujours plus courts, le Rapid Technology Center s’efforce en permanence d’explorer les dernières innovations en fabrication additive. L’objectif : identifier des technologies capables d’accélérer la production de composants tout en maintenant un haut niveau de précision et de fiabilité.

Développer des prototypes de conception avec l'impression 3D SLA

Dans l’atelier de Cologne-Merkenich, les imprimantes 3D SLA sont principalement dédiées à la production rapide de prototypes de conception nécessitant une excellente qualité de surface. Ces machines sont idéales pour les phases d’itération où la vitesse et la précision sont cruciales.

Ford a d’abord introduit la Form 2 de Formlabs dans son parc, avant d’élargir son équipement avec plusieurs imprimantes de bureau supplémentaires ainsi qu’un modèle grand format : la Form 3L. Plus récemment, le centre a eu l’opportunité de tester en avant-première la Form 4, dernière-née de la gamme MSLA de Formlabs.

« La Form 4 est extrêmement rapide. Je n’ai jamais vu une imprimante atteindre une telle vitesse », souligne Bruno Alves, spécialiste de l’outillage et expert en fabrication additive chez Ford. « C’est une nette avancée par rapport aux versions précédentes. Elle est aussi plus intuitive, ce qui facilite grandement la prise en main par nos opérateurs et permet d’obtenir rapidement des pièces de qualité. »

Le centre de Cologne-Merkenich a été l'un des bêta-testeurs de la nouvelle Form 4. La vitesse fulgurante de la nouvelle imprimante permettra à l'atelier de livrer de nouveaux prototypes en quelques heures seulement.

« La Form 4 change la donne. Sa vitesse va révolutionner notre façon de travailler. Nous pouvons produire plus de pièces, et notre rendement est bien plus élevé. Nous sommes beaucoup plus flexibles pour les commandes de dernière minute. Désormais, nous pouvons les honorer sans problème grâce à la Form 4. »

« Il y a encore quelques années, il fallait parfois une journée entière pour obtenir une pièce », se souvient M. Alves. « Aujourd’hui, nous pouvons lancer une impression et récupérer la pièce en quelques minutes. Cette rapidité change tout : les ingénieurs n’hésitent plus à proposer de nouvelles itérations, car ils savent qu’ils recevront rapidement les pièces nécessaires pour valider leurs idées. »

Grâce à ces gains de temps, le Rapid Technology Center est désormais capable de traiter un volume bien plus important de demandes, souvent en moins de 24 heures. Même les équipes basées au Royaume-Uni peuvent recevoir leurs pièces dès le lendemain, grâce à un envoi rapide pendant la nuit.

L'équipe a utilisé l'impression 3D SLA pour prototyper de nombreuses pièces du nouvel Explorer, comme l'assemblage des rétroviseurs.

Dans le cadre du développement du nouvel Explorer, l’équipe a largement utilisé l’impression 3D SLA pour valider la conception de nombreuses pièces, qu’il s’agisse d’éléments extérieurs ou d’habillage intérieur.

« La Form 3L nous offre la possibilité de produire des pièces de grande taille, comme des éléments de carrosserie », précise M. Alves. « Nous avons, par exemple, imprimé une coque de rétroviseur afin de vérifier le design. L’impression 3D est idéale pour ce type de tests : elle est rapide, et la qualité obtenue est proche de celle des pièces issues de la production en série. »

Tester des pièces mécaniques avec l'impression 3D SLS

L’atelier est également équipé d’un parc conséquent d’imprimantes 3D SLS, principalement utilisées pour tester des pièces mécaniques en conditions proches de la production réelle.

« Notre objectif est toujours de valider des matériaux qui se rapprochent le plus possible de ceux utilisés en fabrication de série », explique M. Alves. « La Fuse 1+ 30W, qui imprime en PA-12 nylon, permet d’obtenir des pièces aux caractéristiques très similaires à celles obtenues par moulage par injection. »

Bien que le centre dispose aussi de solutions SLS grand format capables de produire des éléments volumineux, comme des panneaux de carrosserie complets, l’équipe privilégie l’usage de la Fuse 1+ 30W pour toutes les pièces compatibles avec son volume d’impression.

« La Fuse 1+ est beaucoup plus rapide que ses concurrentes. L'utilisation de la machine est également très simple pour nos collaborateurs. En fin de compte, ce qui compte vraiment pour nous, c'est qu'il est très facile de livrer les pièces plus rapidement. »

L’équipe a également participé en avant-première aux tests de la Fuse Blast, une solution automatisée de nettoyage et de finition développée pour le post-traitement des impressions SLS. Cet équipement vient compléter efficacement le flux de travail en fabrication additive.

« La Fuse Blast nous fait gagner un temps précieux », souligne M. Alves. « Il n’est plus nécessaire de nettoyer les pièces à la main. Il suffit de les déposer dans la machine, de lancer le cycle, et le processus s’enclenche automatiquement. Avant, cette tâche manuelle mobilisait les opérateurs pendant de longues minutes. Désormais, ils peuvent se concentrer sur d’autres missions pendant que la Fuse Blast s’occupe du nettoyage. Résultat : un gain d’efficacité notable. »

Le port de charge est un assemblage complexe qu'il aurait été impossible de prototyper avec une autre méthode.

L’un des grands avantages de l’impression 3D SLS réside dans sa capacité à produire des géométries complexes sans nécessiter de structures de support. Une caractéristique que l’équipe a pleinement exploitée lors du développement du nouvel Explorer, en utilisant la Fuse 1+ 30W pour fabriquer plusieurs composants et ensembles mécaniques fonctionnels.

« Pour ce couvercle de compartiment de chargement, l’utilisation du SLS était incontournable », explique M. Alves. « Nous avions besoin d’une pièce entièrement fonctionnelle pour tester les mécanismes associés. La complexité du design rend impossible tout usinage traditionnel, et le moulage par injection n’est pas viable pour fabriquer seulement quelques exemplaires. L’impression 3D avec un matériau technique reste la solution idéale pour obtenir une pièce réaliste et testable physiquement. »

Moulage par injection en interne avec des inserts de moules imprimés en 3D

Le fait de disposer d’un large éventail de technologies de fabrication au sein du Rapid Technology Center permet de créer des flux de production hybrides. L’équipe peut ainsi associer des procédés classiques à des solutions d’outillage rapide issues de l’impression 3D, pour accélérer et optimiser la fabrication de pièces.

Selon l’usage final, le choix du matériau et de la méthode de production est soigneusement adapté afin de trouver le meilleur équilibre entre coût, rapidité et performance. Dans le cadre de crash-tests, par exemple, il est impératif d’utiliser les mêmes matériaux et procédés que ceux employés en fabrication de série. Pour les pièces plastiques, cela signifie souvent recourir au moulage par injection, une méthode exigeant des moules métalliques onéreux et longs à produire.

« L’intégration d’inserts imprimés en 3D dans les moules d’injection ouvre de nouvelles possibilités », explique M. Alves. « Elle nous permet de faire évoluer rapidement les designs. Nous imprimons les cavités, que nous venons ensuite insérer dans les outils pour produire les pièces par injection. C’est un gain de temps considérable. »

Dans le cadre du développement du nouvel Explorer, l’équipe a également eu recours à des inserts de moule imprimés en 3D pour fabriquer des composants en caoutchouc, utilisés notamment dans l’assemblage des poignées de porte. Ces inserts ont été intégrés directement dans leur propre machine de moulage par injection.

« C’était un projet complexe », raconte M. Alves. « Nous devions gérer plusieurs inserts, associés à différentes variantes de conception, chacune nécessitant plusieurs itérations. Un processus classique de moulage par injection en externe peut prendre entre deux et trois mois. En interne, grâce à la fabrication additive, nous avons pu réduire ce délai à deux ou trois semaines maximum. Sans cette solution, nous n’aurions pas été en mesure de livrer les pièces dans les temps. »

Chaque poignée de porte comprend deux de ces éléments en caoutchouc pour l'amortissement et l'isolation. Pour les SUV à quatre portes, cela signifie huit composants uniques pour chaque itération de conception.

Progresser à pas de géant vers l'électrification

L’objectif ambitieux de Ford de proposer une gamme entièrement électrique d’ici 2030 impose un rythme soutenu au centre de développement de Cologne-Merkenich. Pour tenir cette cadence, l’entreprise doit continuellement adopter des technologies de pointe et expérimenter des méthodes de production innovantes. Cela implique d’explorer de nouveaux matériaux, de nouveaux équipements, et de renforcer l’intégration de procédés agiles comme l’impression 3D et l’outillage interne.

« Nos concurrents accélèrent leurs cycles de développement, et nous ne pouvons pas nous permettre de rester en retrait », affirme M. Alves. « C’est pourquoi nous testons sans cesse les dernières innovations en matière de matériaux, de machines et de procédés. Sans la fabrication additive, il nous serait impossible de suivre le rythme. L’impression 3D nous offre la réactivité nécessaire pour concevoir un produit de qualité, dans des délais réduits. »

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